23 mai 2008

Parole au Professeur Bertrand Dautzenberg : "Mai 2008 continuons le combat"

Nous donnons aujourd’hui la parole au professeur Bertrand Dautzenberg (de l’unité Tabac de l’hôpital Pitié Salpêtrière à Paris) qui témoigne sur son regard porté sur les jeunes, leur consommation de tabac en Mai 2008 et les stratégies de l’industrie du tabac.

L’industrie du tabac directement ou par les normes sociales qu’elle impose à nos sociétés essaye en permanence de contourner les obstacles qu’elle rencontre afin de mettre le plus tôt possible les jeunes à la cigarette.

En effet plus les jeunes commencent tôt, plus ils vont facilement développer dans leur cerveau un centre de la dépendance à la nicotine, plus ils fumeront toute leur vie, assurant ainsi les profits des compagnies cigarettières.

Classes Non Fumeurs, avec de nombreux autres acteurs et les initiatives de l’Etat (interdire les paquets de 10, augmenter le prix du tabac, interdire la vente aux moins de 16 ans et montrer dans les campagnes la cigarette comme un produit polluant), a permis de diminuer considérablement le taux de tabagisme des collégiens en 2003/2004 et de maintenir jusqu’en 2007 cette consommation plus basse que par le passé.

Ainsi les données recueillies par exemple à Paris montrent que le tabagisme chez les collégiens et lycéens a fortement diminué entre la période 1991-2003 et 2004-2007 avec le lancement du plan cancer et le changement de l’image sociale du tabac. Le taux de fumeurs quotidiens n’était plus que de 5% à 14 ans et de 15% à 17 ans durant cette période.

L’industrie du tabac a réagi à cette baisse de la consommation des jeunes qui menace à long terme son marché en proposant aux jeunes de nouvelles formes de tabac, comme cela a été fait avec les premix et l’alcool. Une enquête conduite à Paris en fin 2007 sur 1045 élèves de 12-15 ans montre que la chicha (narguilé) et les cigarettes roses parfumées sont les 2 modes de tabac qui ont le plus souvent été expérimentés chez les 12-15 ans, avant les cigarettes standards blondes ou brunes. Les jeunes ignorent pour la plupart que ces tabacs sucrés sont tout aussi toxiques que les autres.

Des actions spécifiques contre ces tabacs sucrés s’imposent car les premières données de 2008 montrent que cette nouvelle offensive de l’industrie du tabac a pu jouer un rôle dans la nette reprise du tabagisme observée en 2008 à Paris avec une augmentation de 66% chez les 12-15 ans et de 16% chez les 16-18 ans. Si le bénéfice de la baisse du tabagisme avec le lancement du plan cancer reste important chez les 16-18 ans, il a été presque complètement grignoté chez les 13-15 ans.

Ainsi en terme de tabagisme, aussi longtemps que l’industrie du tabac sera là, il faut rester actif et vigilant ; Classes Non Fumeurs l’est avec vous afin de ne plus fabriquer de nouvelles générations de fumeurs dépendants du tabac et de préserver à long terme la santé, le bien être et la liberté de tous.